·
CHSCT : la Cour de cassation encadre
les modalités d’élection par scrutins séparés
Dans un arrêt du 18 janvier 2017, la
Cour de cassation apporte une précision inédite quant à
la possibilité de recourir à des scrutins séparés pour chacune des deux
catégories de sièges à pourvoir au CHSCT : le vote doit être concomitant pour
chaque scrutin et le dépouillement doit intervenir à l’issue de tous les votes.
Selon
l’effectif de l’établissement, la délégation du personnel au CHSCT
doit comporter un certain nombre de sièges réservés au personnel
de maîtrise et d’encadrement(C. trav., art. R. 4613-1).
Pour faciliter l’attribution ultérieure des sièges sans avoir notamment à
modifier l’ordre de présentation des candidats sur les listes, la jurisprudence
permet au collège désignatif de procéder à deux scrutins séparés pour
chacune des deux catégories de sièges. Dans un arrêt du 18 janvier, la Cour de
cassation pose toutefois un garde-fou essentiel, destiné à préserver la
sincérité de l’élection : les résultats du premier scrutin ne doivent pas être
connus avant la tenue du second, ce qui implique que les scrutins aient lieu
de manière concomitante et que le dépouillement soit réalisé après
le déroulement de l’un et l’autre vote.
Dépouillement du premier scrutin avant le second vote
Dans cette
affaire, la délégation du personnel au CHSCT avait été élue selon deux scrutins
séparés, l’un pour pourvoir les sièges non affectés à une catégorie
particulière de salariés, l’autre pour pourvoir les sièges réservés au
personnel de maîtrise et d’encadrement.
Rappelons
que, dans le silence de la loi, c’est la jurisprudence qui autorise
le collège désignatif (CE et DP) à recourir à des scrutins séparés,
cette décision ne nécessitant pas d’être prise à l’unanimité (Cass. soc., 29
février 2012, nº 11-11.410). Tous les membres du collège
désignatif doivent alors participer aux deux scrutins (Cass. soc., 30
octobre 2001, nº 00-60.230). En dehors de ces deux précisions,
les conditions d’organisation de ces scrutins séparés n’ont guère été
explicitées.
En l’espèce,
un syndicat a réclamé l’annulation de la désignation des membres
du CHSCT au motif, notamment, que « le résultat d’un des collèges
avait été connu des électeurs avant de voter dans l’autre
collège ».
Le Tribunal
d’instance de Versailles a rejeté cette demande au motif qu’il n’était pas
démontré en quoi cette circonstance aurait influencé les résultats du second
scrutin. À l’appui de son pourvoi, le syndicat a alors fait valoir que ce
procédé était directement contraire à un principe général du droit
électoral, à savoir la sincérité du scrutin.
Et, comme à
chaque fois qu’un principe général du droit électoral est en cause, la Cour de
cassation a conclu à l’annulation de l’élection.
Cause d’annulation de l’élection
L’arrêt du 18
janvier 2017 explique en effet que « lorsque le collège spécial unique procède
à la désignation des membres du CHSCT par deux scrutins séparés dont l’un est
destiné à l’élection du ou des salariés appartenant au personnel de maîtrise ou
d’encadrement, il doit être procédé à un vote concomitant pour chacun
des scrutins et le dépouillement ne peut intervenir qu’après
la fin de tous les votes, la connaissance par les membres
du collège désignatif des résultats du scrutin précédent étant de nature à
influer sur le choix fait lors du second scrutin et donc à fausser la sincérité
de l’élection ».
Compte tenu
de la formulation retenue par l’arrêt, l’annulation des deux scrutins est
inéluctable dès lors que les résultats du premier ont été connus avant le
second, cette circonstance étant « de nature » à fausser la sincérité de
l’élection. Il n’y a donc pas lieu de rechercher, comme l’avait fait ici le
tribunal d’instance, si la connaissance des résultats du premier vote avait
exercé ou non une influence sur le second scrutin. Le jugement ayant validé
l’élection des membres du CHSCT a ainsi été annulé.
En pratique,
le recours à des scrutins séparés est désormais mieux encadré : ils doivent
avoir lieu simultanément et le dépouillement ne peut intervenir qu’après la
clôture des deux scrutins. Il s’agit d’éviter que les électeurs soient
influencés au fur et à mesure des résultats et, par exemple, qu’un syndicat qui
a obtenu la majorité des sièges dans le collège non cadre n’obtienne aucun
suffrage lors du scrutin dédié aux sièges réservés (et inversement).