mercredi 8 mars 2017

Bref du social du 7 Mars

ACTUALITE JURIDIQUE ET SOCIALE

·        Le permis B sera éligible au CPF à compter du 15 mars 2017

À compter du 15 mars, il sera possible de mobiliser les heures inscrites sur son CPF pour financer la préparation au code de la route et à l’épreuve pratique du permis de conduire des véhicules de catégorie B. L’éligibilité de ces actions de formation au CPF est en effet encadré par un décret du 2 mars 2017. Il prévoit notamment, que le compte ne pourra être mobilisé, que si l’obtention du permis s’inscrit dans la réalisation d’un projet professionnel ou sécurise le parcours professionnel du titulaire du compte.
L’éligibilité du permis B au compte personnel de formation (CPF) introduite par la loi Égalité et citoyenneté est désormais encadrée. Un décret du 2 mars 2017 prévoit, en effet, les conditions et les modalités de prise en charge par le compte des différentes actions menant à l’obtention du permis. Cette éligibilité n’est pas immédiatement applicable, le décret en prévoit l’entrée en vigueur au 15 mars 2017, alors que la loi l’avait fixée au 1er janvier 2017. Dans un communiqué du 3 mars le ministère de l’intérieur précise que cette possibilité de financement du permis de conduire est cumulable avec d’autres dispositifs comme le « permis à un euro par jour » pour les jeunes.
Les conditions d’éligibilité du permis B
Afin que la préparation à l’épreuve théorique du code de la route et à l’épreuve pratique du permis de conduire autorisant la conduite des véhicules légers de catégorie B soit éligible au CPF les conditions suivantes doivent être remplies (C. trav., art. D. 6323-8-3, I nouveau).
• L’obtention du permis B doit contribuer à la réalisation d’un projet professionnel ou à favoriser la sécurisation du parcours professionnel du titulaire du compte. La vérification de cette condition dépendra du financeur et non des opérateurs du conseil en évolution professionnel (CEP), comme cela avait été envisagé.
• Le titulaire du compte ne doit pas faire l’objet d’une suspension de son permis ou d’une interdiction de solliciter un permis. L’intéressé doit fournir une attestation sur l’honneur afin de vérifier cette obligation.
Les conditions liées à l’école de conduite
Pour pouvoir être prise en charge, la préparation (au code ou à la conduite) doit être assurée par un établissement d’enseignement de la conduite et de la sécurité routière. Cet établissement doit être spécifiquement agréé par l’administration (C. route, art. L. 213-1 ou L. 213-7), mais il doit aussi être déclaré en tant qu’organisme de formation (C. trav., art. L. 6351-1).
À compter du 1er janvier 2018, l’établissement devra, en outre, respecter les critères permettant de s’assurer de sa capacité à délivrer une formation de qualité et être inscrits à ce titre dans le catalogue de référence des organismes financeurs. Dans son communiqué, le ministère de l’intérieur indique qu’il a engagé une concertation avec les organisations professionnelles pour aboutir d’ici à 2018 à l’établissement d’un label qualité spécifique à ce secteur. Une fois reconnu par le Cnefop ce label offrira à ceux qui le détiennent une présomption de leur capacité à offrir une formation de qualité.
Les modalités de prise en charge des frais de préparation
Les actions de préparation à l’obtention du permis sont financées par l’Opca ou l’employeur (s’il gère les fonds du CPF) si la personne est salariée ou par le FPSPP (Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels) pour les demandeurs d’emploi (C. trav., art. R. 6323-5 et R. 6323-6). Le décret distingue deux modalités de prise en charge en fonction de la nature de la formation :
– les frais de préparation à l’épreuve théorique du code de la route sont pris en charge soit sous la forme d’un forfait en euros et en nombre d’heures, soit sur la base du nombre d’heures effectivement dispensées ;
– les frais de préparation à l’épreuve pratique du permis de conduire, ainsi que les frais occasionnés par la présence d’un moniteur lors de l’épreuve ou pour s’y rendre (C. trav., art. R. 213-3-3) sont pris en charge par les organismes financeurs sur la base du nombre d’heures effectivement dispensées.
 

·        La loi Travail offre plus de liberté aux groupes pour négocier, estime P.-H. Antonmattei, avocat

La loi Travail du 8 août 2016 a modifié le régime des accords de groupe afin de leur donner plus de poids. Retour sur la réforme avec Paul-Henri Antonmattei, professeur (Université de Montpellier) et avocat (Barthélémy Avocats).
Donner un nouveau souffle à la négociation collective de groupe, tel est l’un des objectifs de la loi Travail du 8 août 2016 (v. le dossier juridique -Accords- nº 62/2016 du 9 septembre 2016). Pour y parvenir, le législateur a clarifié les règles relatives aux syndicats habilités à signer un accord de groupe. Il a également renforcé la valeur juridique des accords de groupe, et a revu leur articulation avec les accords collectifs conclus aux niveaux inférieurs. Qu’en est-il en pratique Paul-Henri Antonmattei, professeur (Université de Montpellier) et avocat (Barthélémy Avocats), nous livre son point de vue sur ces changements.
Quels sujets peuvent être négociés au niveau du groupe ?
À juste titre, la loi El Khomri du 8 août 2016 offre, enfin, à l’accord de groupe la même capacité normative que celle de l’accord d’entreprise en affirmant que l’ensemble des négociations prévues par le Code du travail « au niveau de l’entreprise peuvent être engagées et conclues au niveau du groupe dans les mêmes conditions », sous réserve des adaptations prévues par le Code (C. trav., art. L. 2232-33, al. 1). La généralité de la nouvelle disposition législative permet de négocier au niveau du groupe un accord PSE d’une entreprise.
Autre changement attendu : à l’égard de la branche, l’accord de groupe n’est plus dans une situation de tutelle. Alors qu’avec la loi du 4 mai 2004, il ne pouvait déroger aux stipulations des conventions et accords de branche qu’avec l’autorisation expresse de ces derniers, l’accord de groupe bénéficie désormais de la capacité de dérogation de l’accord d’entreprise qui risque toutefois, en pratique de s’étioler, avec l’obligation qui pèse sur chaque branche de négocier « un ordre public conventionnel ».
L’accord de groupe tel que consacré par la loi Travail simplifiera-t-il le dialogue social dans les entreprises ?
Il ne s’agit pas tant de simplifier que de favoriser une homogénéité conventionnelle au sein d’un groupe. Cerise sur le gâteau, les négociations obligatoires d’entreprise peuvent être désormais prises en charge par la négociation de groupe. Autant dire qu’au sein des groupes, espaces de travail d’environ 10 millions de salariés, la stratégie de négociation change de dimension sans pour autant que l’accord de groupe ne devienne un modèle. La loi nouvelle offre simplement plus de liberté mais, plus qu’avant, il appartient désormais à chaque groupe de déterminer en fonction de son histoire, de ses négociateurs, de ses caractéristiques économiques et sociales, de ses projets, le périmètre pertinent de négociation. Si les modifications juridiques n’ont pas cette résonance stratégique, on peut douter de leur utilité.
En cas de conclusion d’un accord de groupe, l’entreprise peut-elle revenir par accord sur certains points ?
Tout dépend. La loi El Khomri retient une nouvelle règle d’articulation entre l’entreprise et le groupe favorable à ce dernier : « lorsqu’un accord conclu dans tout ou partie d’un groupe le prévoit expressément, ses stipulations se substituent aux stipulations ayant le même objet des conventions ou accords conclus antérieurement ou postérieurement dans les entreprises ou les établissements compris dans le périmètre de cet accord » (C. trav., art. L. 2253-5). L’accord de groupe peut ainsi effacer un passé conventionnel d’entreprise et préempter un thème pour l’avenir. Si cette prérogative n’est pas utilisée, un conflit de stipulations pourra se régler par application de celle qui sera jugée la plus favorable. Mais cette solution est réservée aux avantages. Pour des dispositions d’organisation, comme de nombreuses dispositions en matière de durée du travail, un conflit entre accord de groupe et accord d’entreprise continuera à poser de sérieuses difficultés surtout pour les thèmes offerts désormais à la primauté de l’accord d’entreprise.
Quelles questions faut-il se poser avant d’entamer une négociation de groupe ?
L’ouverture d’une négociation de groupe est le résultat d’une réflexion stratégique sur le périmètre pertinent de négociation et les relations avec les déclinaisons entreprise et établissement. La durée de l’accord devient, avec la réforme du 8 août 2016, un thème supplémentaire de réflexion. Le poids respectif des organisations syndicales est un sujet à traiter avec minutie, car la complexité peut être réelle. Il importe aussi, comme pour l’entreprise, de s’interroger sur l’objet de la négociation et sur les règles de validité qui lui sont associées.
Préalablement à l’ouverture d’une négociation, l’employeur doit informer les syndicats. Comment faire ?
On privilégiera une information écrite en respectant un délai raisonnable permettant aux organisations syndicales concernées de pouvoir désigner un ou des coordonnateurs syndicaux de groupe choisis parmi les délégués syndicaux du groupe et habilités à négocier et signer la convention ou l’accord de groupe, comme le Code du travail le prévoit. La conclusion d’un accord-cadre de méthode pour la négociation de groupe permettra de régler plus efficacement ces questions.
La loi simplifie-t-elle la mesure de la représentativité au niveau du groupe ?
Espérons-le, mais le complément apporté par la loi qui a pour objectif légitime « de préserver la stabilité de la négociation dès lorsqu’il existe un périmètre stable et habituel de négociation tout en renforçant la légitimité des accords qui concernent un nouveau périmètre », n’est pas si simple à mettre en œuvre. On sait que « la représentativité des organisations syndicales au niveau de tout ou partie du groupe est appréciée conformément aux règles définies aux articles L. 2122-1 à L. 2122-3 relatifs à la représentativité syndicale au niveau de l’entreprise, par addition de l’ensemble des suffrages obtenus dans les entreprises ou établissements concernés ». La loi nouvelle met désormais en place une distinction en fonction du périmètre des entreprises ou établissements compris dans le champ d’application de l’accord de groupe dont la négociation est envisagée. Si ce périmètre « est identique à celui d’un accord conclu au cours du cycle électoral précédant l’engagement des négociations, la représentativité des organisations syndicales est appréciée par addition de l’ensemble des suffrages obtenus dans ces entreprises ou établissements soit pour le cycle en cours, lorsque les élections se sont tenues à la même date, soit lors des dernières élections intervenues au cours du cycle précédant le cycle en cours, lorsque les élections se sont tenues à des dates différentes » (C. trav., art. L. 2122-4, al. 2 et 3). Dommage que la loi ne précise pas la méthode de détermination du cycle électoral. On se souviendra de la préconisation de la circulaire DGT nº 20 du 13 novembre 2008: « la première mesure de la représentativité au niveau du groupe s’effectue sur un cycle électoral complet (de deux à quatre ans). Le point de départ de ce cycle est constitué par les résultats des élections professionnelles de la première entreprise du groupe pour laquelle la première réunion de la négociation du protocole d’accord préélectoral est postérieure à la publication de la loi. Par la suite, la mesure de la représentativité au niveau du groupe s’effectue par addition des suffrages obtenus lors des dernières élections professionnelles de l’ensemble des entreprises du groupe, pour un cycle d’élections donné dans la même logique que la mesure de la représentativité dans les entreprises à établissements multiples ». Mais faut-il nécessairement partir de 2008 ou peut-on déterminer le cycle à partir de la date d’engagement des négociations de l’accord de groupe en remontant le temps ? Si le périmètre est différent (par exemple en cas d’entrée de nouvelles entreprises au sein du groupe), la règle est plus simple : « la représentativité est appréciée par addition de l’ensemble des suffrages obtenus lors des dernières élections organisées dans les entreprises ou établissements compris dans le périmètre de l’accord ».
Quelles sont les règles de validité de l’accord de groupe ?
Le Code du travail renvoie aux règles de validité de l’accord d’entreprise, les taux de 30 % et 50 % devant être appréciés à l’échelle de l’ensemble des entreprises comprises dans le périmètre de l’accord de groupe. Si une consultation des salariés est nécessaire, elle est effectuée dans ce périmètre. Depuis le 1er janvier 2017, la vigilance est de mise pour les accords qui portent sur la durée du travail, les repos et les congés dont la validité est subordonnée à la signature d’une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés. En ne retenant que les suffrages exprimés en faveur des organisations syndicales représentatives, la réforme conduit à neutraliser les suffrages obtenus par les organisations syndicales non représentatives. En présence d’un accord de groupe qui concerne par nature plusieurs entreprises, le nouveau calcul sera plus complexe à établir.
Peut-on réviser un accord de groupe ?
Comme tout accord collectif, l’accord de groupe peut être révisé et doit contenir une clause de révision. La difficulté peut provenir de l’application à l’accord de groupe du nouveau régime de révision qui est calé sur le cycle électoral. On sait, en effet, que jusqu’à la fin du cycle au cours duquel l’accord qui va être révisé a été conclu, sont habilitées à engager la procédure de révision une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d’application de l’accord et signataires ou adhérentes de cet accord. Il faudra, à nouveau, ne pas se tromper dans la détermination du cycle. À l’issue de ce cycle, il suffit pour une organisation syndicale de salariés d’être représentative dans le champ d’application de l’accord pour pouvoir réviser. Dans ce cas, on appliquera les règles particulières de représentativité pour identifier les organisations syndicales concernées.

Bref du social du 6 mars

JURISPRUDENCE

·        Liste commune : chacun des colistiers peut être amené à désigner un DS supplémentaire

La présentation d’une liste commune lors des élections du CE n’implique pas nécessairement la désignation, en commun, d’un seul et même délégué syndical supplémentaire. La Cour de cassation précise en effet, dans un arrêt du 22 février 2017, que si les conditions de cette désignation sont satisfaites individuellement par chacun des colistiers, chacun d’eux pourra désigner son propre délégué syndical supplémentaire.
Dans les entreprises d’au moins 500 salariés, le Code du travail permet à tout syndicat de désigner un délégué syndical supplémentaire à deux conditions : d’une part, être représentatif et, d’autre part, avoir obtenu lors des dernières élections au CE au moins un élu dans le collège ouvriers/employés et un élu dans le deuxième ou troisième collège (C. trav., art. L. 2143-4).
La présentation d’une liste commune à plusieurs syndicats peut alors poser difficulté : chacun d’eux pourra-t-il désigner un DS supplémentaire ou faut-il considérer qu’à partir du moment où ils ont choisi de s’allier pour la présentation de candidats, cela vaut également pour la désignation du délégué syndical supplémentaire, laquelle devra donc être faite en commun ?
La Cour de cassation clarifie ce point dans un arrêt du 22 février dernier, en permettant à chacun des syndicats de désignerson propre DS supplémentaire s’il remplit à lui seul l’ensemble des conditions précitées. Comme cela avait été admis en 2008, il reste toujours possible d’opter plutôt pour une désignation en commun.
Résultats indivisibles d’après le tribunal d’instance
Aux dernières élections du comité d’établissement, deux syndicats CFDT et Unsa ont présenté une liste commune. À l’issue du scrutin, ils remplissaient chacun les conditions de désignation d’un délégué syndical supplémentaire :
– en application de la clé de répartition des suffrages, ils ont obtenu chacun 10 % des voix, de sorte qu’ils étaient tous deux représentatifs ;
– ils ont chacun obtenu des élus dans les trois collèges du comité d’établissement.
Les deux syndicats ont alors désigné, chacun, un délégué syndical supplémentaire, ce que l’employeur a contesté en saisissant le Tribunal d’instance de Paris 12e. Les juges du fond lui ont donné raison en considérant que la désignation du délégué syndical supplémentaire doit, dans tous les cas de figure, être opérée en commun par des syndicats ayant présenté une liste commune, en appréciant les résultats électoraux de manière commune et indivisible et non pas individuellement pour chaque syndicat. Le jugement a cependant été censuré par la Cour de cassation.
Désignations séparées possibles si les conditions légales sont remplies
Rappelant que « dans les entreprises d’au moins 500 salariés, tout syndicat représentatif dans l’entreprise peut désigner un délégué syndical supplémentaire s’il a obtenu un ou plusieurs élus dans le collège des ouvriers et employés lors de l’élection du comité d’entreprise et s’il compte au moins un élu dans l’un des deux autres collèges », l’arrêt du 22 février ajoute que « lorsque plusieurs syndicats ont constitué une liste commune aux élections du comité d’entreprise, chacun d’eux peut procéder à la désignation d’un délégué syndical supplémentaire dès lors qu’il remplit à lui seul l’ensemble de ces conditions ».
Chaque colistier peut donc être amené à désigner son propre DS supplémentaire au regard de sa propre audience (laquelle dépend de la clé de répartition des suffrages communiquée avant le scrutin : C. trav., art. L. 2122-3) et du nombre d’élus qu’il a obtenu sous son étiquette dans les différents collèges (lequel dépend de l’ordre de présentation des candidats, négocié entre les colistiers).
Dans le cas d’espèce, puisque les deux syndicats remplissaient individuellement l’ensemble des conditions requises pour désigner un DS supplémentaire, il leur était donc possible de désigner un DS supplémentaire CFDT et un DS supplémentaire Unsa.
Retour sur une jurisprudence de 2008
La Haute juridiction tempère ainsi très nettement les effets d’une jurisprudence de 2008 en vertu de laquelle il avait été posé pour principe « qu’au cas où des syndicats ont présenté des listes communes aux élections, un seul délégué syndical supplémentaire peut être désigné d’un commun accord entre les syndicats ayant présenté ces listes ; […] il appartenait dès lors aux deux syndicats concernés de procéder à la désignation d’un seul nouveau délégué syndical supplémentaire commun au vu des résultats électoraux venant d’être obtenus par la liste qu’ils avaient constituée en commun » (Cass. soc., 18 novembre 2008, nº 08-60.397 PB). Dans son rapport d’activité pour 2008, la Cour de cassation avait même suggéré au législateur de modifier l’article L. 2143-4 du Code du travail pour y intégrer ce principe selon lequel « en cas de liste commune, le délégué syndical est désigné par commun accord des syndicats ayant présenté des candidats sur la liste commune ». Cette suggestion n’a cependant jamais été suivie d’effet, de sorte que la Haute juridiction a eu toute latitude pour autoriser, désormais, des désignations séparées au bénéfice des syndicats colistiers remplissant individuellement les conditions posées par l’article L. 2143-4 du Code du travail.
Maintien de la possibilité d’opter pour une désignation commune
L’arrêt du 22 février maintient expressément « la possibilité pour les syndicats ayant constitué une liste commune de désigner ensemble un délégué syndical supplémentaire ». Il appartiendra donc aux syndicats de choisir entre :
– soit des désignations séparées par chaque syndicat qui remplit à lui seul les conditions légales de désignation ;
– soit une seule et unique désignation effectuée en commun. Cette faculté, alternative, s’appliquera notamment dans le cas où un ou plusieurs des colistiers, pris individuellement, ne remplit pas la condition liée à l’obtention d’élus à la fois dans le premier collège et dans le 2e ou 3e collège.
On notera qu’une telle option avait également été reconnue par la jurisprudence pour la désignation d’un représentant syndical au CE dans les entreprises d’au moins 300 salariés, sous l’empire des dispositions issues de la loi du 20 août 2008 (v. Cass. soc., 4 novembre 2009, nº 09-60.066 permettant la désignation d’un RS au CE par chacun des syndicats de la liste si chacun d’eux a obtenu, en fonction de la clé de répartition choisie, au moins deux élus sur la liste commune ; Cass. soc., 31 janvier 2012, nº 11-11.856 reconnaissant la possibilité de désigner un représentant syndical commun dès lors que le nombre d’élus de la liste est au moins égal à deux).

·        Désignation du RSS : le syndicat doit satisfaire au critère de transparence financière

Pour désigner un représentant de section syndicale (RSS), le syndicat non représentatif doit satisfaire à des critères légaux précis, et notamment à celui lié à la transparence financière applicable à tout syndicat qui entend exercer des prérogatives dans l’entreprise. Telle est la précision, inédite, apportée par la Cour de cassation dans un arrêt du 22 février 2017.
Les dispositions du Code du travail fixant les conditions de désignation du RSS n’exigent pas expressément que le syndicat remplisse le critère de transparence financière, lequel fait uniquement partie de la liste des sept critères cumulatifs auxquels est subordonnée la représentativité (C. trav., art. L. 2121-1). À s’en tenir à la lettre des textes, la transparence financière n’était donc pas une condition de validité de la désignation du RSS.
La Cour de cassation vient toutefois d’en décider autrement, dans un arrêt publié du 22 février 2017 : le critère de la transparence financière doit être respecté par tout syndicat, qu’il soit ou non représentatif dans l’entreprise, afin de pouvoir y exercer « des prérogatives ». Y compris donc dans le cas où il souhaite y désigner un RSS.
Conditions de désignation du RSS posées par les textes
La possibilité de désigner un RSS est légalement reconnue aux syndicats non représentatifs dans l’entreprise ou l’établissement, dès lors qu’ils y ont constitué une section syndicale(C. trav., art. L. 2142-1-1). Or, pour constituer une section, le syndicat doit réunir les conditions suivantes (C. trav., art. L. 2142-1) :
– compter plusieurs adhérents dans l’entreprise ou l’établissement ;
– satisfaire aux critères de respect des valeurs républicaines et d’indépendance ;
– être légalement constitué depuis au moins deux ans ;
– et avoir un champ professionnel et géographique couvrant l’entreprise concernée.
Cette liste ne renvoie pas au critère de transparence financière, exigé expressément par l’article L. 2121-1 du Code du travail en vue de l’établissement de la qualité de syndicat représentatif. La circulaire d’application de la loi du 20 août 2008 – loi qui a introduit ce critère de représentativité – ne le mentionne pas non plus parmi ceux auxquels il doit être satisfait pour désigner un RSS dans l’entreprise (Circ. DGT nº 20, 13 novembre 2008, fiche nº 4).
Pourtant, dans la présente affaire, un employeur demandait l’annulation de la désignation du RSS au motif notamment que le syndicat désignataire ne remplissait pas ce critère.
Le Tribunal d’instance de Saint-Germain-en-Laye l’a débouté en se fondant sur une lecture stricte des textes précités : « la régularité de la désignation d’un représentant de section syndicale n’implique pas que le syndicat à l’origine de cette désignation remplisse les conditions prévues aux articles L. 2121-1 et L. 2121-2 relatifs à la représentativité, mais les conditions des articles L. 2142-1 et L. 2142-1-1 du Code du travail ».
La Cour de cassation a censuré le jugement.
Critère de la transparence financière exigé pour tout syndicat
Pour la Haute juridiction, bien que cela ne soit pas expressément exigé par l’article L. 2142-1 du Code du travail, le respect ducritère de transparence financière est une condition de validité de la désignation du RSS.
L’arrêt affirme en effet, pour la première fois et de manière générale, que « tout syndicat doit, pour pouvoir exercer des prérogatives dans l’entreprise, satisfaire au critère de transparence financière ».
Cet arrêt paraît ainsi accréditer l’idée, défendue par certains auteurs, selon laquelle les sept critères cumulatifs posés par l’article L. 2121-1 du Code du travail pour accéder au rang de syndicat représentatif, ne sont pas tous exclusivement dédiés à cet objectif. Certains d’entre eux, tels l’indépendance, les valeurs républicaines, la transparence financière et l’ancienneté de deux ans, sont davantage destinés à permettre de qualifier une organisation de syndicat habilité à s’implanter en entreprise et à y exercer une action syndicale. L’audience, l’influence, les effectifs d’adhérents et les cotisations seraient quant à eux spécifiquement relatifs à la représentativité.
Contre toute attente, dans la mesure où le critère de transparence financière est exigé, selon la formulation générale retenue par l’arrêt, de « tout syndicat » afin de pouvoir exercer « des prérogatives dans l’entreprise », on peut supposer qu’il devra également être rempli par les syndicats non représentatifs qui entendent exercer des prérogatives autres que la désignationd’un RSS, notamment pour créer une section syndicale, participer à la négociation du protocole d’accord préélectoral ou encore, pour présenter des candidats au premier tour des élections. Reste à la Cour de cassation à le confirmer dans ses prochains arrêts.

jeudi 23 février 2017

Bref du social

ACTUALITE JURIDIQUE ET SOCIALE
·        Décès du président de la FNSEA Xavier Beulin 
 
Le principal syndicat agricole français, la FNSEA, a annoncé le 18 février le « décès brutal », à l’âge de 58 ans, de son président Xavier Beulin.
Parallèlement à ses fonctions à la tête du syndicat agricole (depuis 2010), Xavier Beulin était le président du groupe Avril (marques Lesieur, Puget, Matines).
Source AFP
Voir l’hommage rendu par la CFTC dans le communiqué de presse du 20 février 2017 que vous trouverez en pièce jointe.
·        Clauses de recommandation : les modalités de gestion mutualisée des prestations à haut degré de solidarité sont fixées 
 
Dans le cadre des accords de branche professionnelle, les partenaires sociaux peuvent recommander aux entreprises un ou plusieurs organismes assureurs pour la couverture du risque santé de leurs salariés.
Pour être valable, un accord collectif relatif à la complémentaire santé prévoyant la recommandation d’un organisme assureur doit être négocié après un appel d’offre et présenter un « haut degré de solidarité ».
Le degré élevé de solidarité est reconnu lorsque l’accord collectif prévoit, en plus des garanties collectives santé, des prestations à caractère non directement contributif comme des services d’action sociale ou de prévention.
L’accord de branche doit prévoir qu’au moins 2 % des primes ou des cotisations du contrat de complémentaire santéservent à financer les prestations correspondant au « haut degré de solidarité ».
 
Les partenaires sociaux peuvent décider que les garanties accordées dans le cadre du « haut degré de solidarité » seront gérées de façon mutualisée pour toutes les entreprises de la branche.
Le décret du 9 février 2017 définit les modalités selon lesquelles cette gestion mutualisée est mise en œuvre. Il impose que les accords de branche :
  • Définissent les prestations gérées de manière mutualisée qui comprennent des actions de prévention ou des prestations d’action sociale réglementaires
  • Déterminent les modalités de financement de ces actions. Ce financement peut prendre la forme d’un montant forfaitaire par salarié, d’un pourcentage de la prime ou de la cotisation, ou d’une combinaison de ces deux éléments
  • Créent un fonds finançant les prestations « solidaires » et percevant les ressources réglementaires (2 % des primes ou cotisations)
  • Précisent les modalités de fonctionnement de ce fonds, notamment les conditions de choix du gestionnaire chargé de son pilotage par la commission paritaire de branche
·        Reconnaissance du burn out : un rapport suggère d’abaisser le taux minimal d’IPP 
Si la constitution d’un tableau de maladie professionnelle sur le burn out n’est pas dans l’immédiat envisageable, il est, en revanche, possible d’assouplir les conditions permettant la reconnaissance de cette affection en maladie professionnelle, et en particulier d’abaisser le taux d’incapacité permanente partielle (IPP) requis, estime la mission parlementaire relative au syndrome d’épuisement professionnel, qui a présenté son rapport le 15 février.
À l’heure où les nouvelles technologies de l’information et de la communication ont rendu poreuse la frontière entre vie professionnelle et vie professionnelle, où les nouveaux modes d’organisation du travail ont favorisé l’émergence des risques psychosociaux (RPS), la nécessité de se pencher sur le phénomène du « burn out », en français « épuisement professionnel », est devenue une urgence. D’où la mise en place, en juin 2016, d’une mission d’information « relative au syndrome d’épuisement professionnel ». Celle-ci a présenté ses conclusions le 15 février. Elle préconise notamment d’expérimenter la baisse du taux d’IPP (incapacité permanente partielle) permettant la reconnaissance du burn out en maladie professionnelle (MP) et d’intégrer la prévention des RPS dans le dialogue social en entreprise.
Fixer à 10 % le taux d’IPP pour la reconnaissance en MP
Alors que plusieurs médecins et parlementaires réclament la construction d’un tableau de maladie professionnelle sur le burn out, la mission considère « qu’en l’état de la science médicale, il n’est actuellement pas possible d’élaborer un tableau qui permettrait de prendre en charge l’épuisement professionnel dans les conditions de droit commun ». À cet égard, elle souligne qu’aucune maladie psychique ne dispose d’un tableau de maladie professionnelle.
Elle estime, en revanche, que doivent être assouplis les critères exigés dans le cadre de la procédure de reconnaissance par les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP). Actuellement, pour qu’une maladie non mentionnée dans un tableau soit reconnue comme maladie professionnelle, elle doit avoir entraîné une IPP d’au moins 25 % et la victime doit apporter la preuve du lien de causalité entre la maladie et le travail. Or, ce taux d’IPP n’est que rarement attribué s’agissant des affections psychiques. Afin de permettre la prise en charge des victimes, la mission propose donc d’expérimenter, pour une durée limitée, l’abaissement à 10 % du taux minimal d’IPP, voire sa suppression.
Notons, toutefois, que la mission n’écarte pas la possibilité d’intégrer le burn out dans le dispositif des tableaux des maladies professionnelles. Mais plusieurs obstacles doivent encore être levés pour y parvenir. Tout d’abord, il est nécessaire de disposer d’une définition médicale du burn out. À cet égard, Marisol Touraine avait annoncé en février 2016 la mise en place d’un groupe de travail chargé de proposer une définition. En outre, reste à établir les conditions dans lesquelles le burn out peut être imputable à l’activité professionnelle.
Renforcer la lutte contre les RPS dans l’entreprise
Pour la mission, la lutte contre le burn out doit s’inscrire dans une politique plus générale de prévention des RPS et d’amélioration de la qualité de vie au travail dans l’entreprise. À cet effet, elle propose de mobiliser plusieurs outils.
 Agir par le dialogue social. La mission suggère d’intégrer le sujet de la prévention des RPS dans le champ « égalité professionnelle et qualité de vie au travail » de la négociation annuelle obligatoire. Toutefois, le dialogue social seul ne saurait suffire et la mission considère que l’action syndicale doit également porter sur le terrain, au plus prêt des situations de travail et des salariés. S’inspirant de l’exemple québécois, elle préconise la mise en place d’un réseau de salariés et de représentants du personnel (DP et CHSCT), formés à la prévention des RPS, chargés de jouer le rôle de « sentinelles bienveillantes » dans l’entreprise.
 Étendre le droit d’alerte des représentants du personnel. La mission recommande de permettre aux DP et aux membres duCHSCT d’exercer leur droit d’alerte pour demander la mise en œuvre de la procédure d’évaluation des risques ou son actualisation. Alors que tout employeur est tenu d’évaluer les risques professionnels dans l’entreprise, d’en retranscrire les résultats dans un document unique et de l’actualiser, la mission constate que moins de la moitié des entreprises respecte cette obligation. Elle souligne également le caractère peu dissuasif de la sanction encourue, les mises en demeure délivrées par l’inspection du travail étant très rares (138 en 2014 selon les chiffres de la DGT).
Enfin, la mission propose que soit élaboré des outils et un guide pratique d’évaluation des risques, comportant un ou plusieurs modèles-types de documents uniques adaptés aux différents secteurs d’activité.
 
 
REGLEMENTATION
·        L’avenant faisant évoluer le régime de frais de santé des coopératives vinicoles est étendu 
L’avenant du 9 juin 2016 ayant modifié l’accord du 2 février 2011 relatif au régime conventionnel de remboursement complémentaire de frais de santé dans les caves coopératives vinicoles et leurs unions est étendu depuis le 9 février 2017. Prenant en compte l’évolution de la législation, il supprime notamment la clause de désignation. Il comporte aussi en annexe un tableau actualisé des garanties couvertes.
Avenant nº 6 du 9 juin 2016, étendu le 9 février 2017, modifiant l’accord du 2 février 2011 sur le régime complémentaire de frais de santé des coopératives vinicoles
La Confédération des coopératives vinicoles et les fédérations syndicales CFDT, CFE-CGC, CFTC, FO et Unsa ont conclu un avenant, le 9 juin 2016, pour placer l’accord du 2 février 2011 ayant créé la complémentaire santé dans les coopératives vinicoles en conformité avec la loi. Applicable au 1er janvier 2017, l’avenant, qui supprime notamment la clause de désignation, a été étendu, le 9 février 2017, par un arrêté ne comportant aucune réserve. Rappelons que le précédent avenant relatif au taux de cotisations, signé le 18 novembre 2015, a été étendu le 3 mai 2016.
Fin de la clause de désignation
En 2011, les partenaires sociaux avaient désigné CCPMA Prévoyance pour assurer la mutualisation des garanties prévues par l’accord. Conformément à la législation de l’époque, cette désignation était établie pour une durée maximale de cinq ans. L’avenant du 9 juin 2016 supprime l’article 8 de l’accord prévoyant cette désignation, se conformant ainsi à la décision du Conseil constitutionnel du 13 juin 2015. Les signataires ont en outre choisi de ne pas émettre de recommandation d’un assureur, laissant donc aux coopératives vinicoles la totale liberté de leur choix.
L’avenant supprime aussi l’article 9 relatif au sort des régimes frais de santé mis en place précédemment dans les entreprises. Il supprime en outre l’article 10, qui créait une commission paritaire nationale de suivi, réunie au moins une fois par an. Cette commission était notamment chargée de procéder à un réexamen du mode de répartition de la cotisation entre l’employeur et le salarié en fonction des comptes de résultat annuels présentés par l’assureur. L’assureur, de son côté, devait, au cours de cette réunion annuelle, présenter son rapport sur les comptes de la convention le reliant à la branche.
Enfin, l’avenant comporte en annexe le tableau des garanties à assurer aux salariés.