mardi 9 avril 2013

Le monde selon Denis Kessler

Depuis quelques jours , Denis Kessler , idéologue  du MEDEF , Vice-président exécutif du MEDEF de 1998 à 2002 ,  fait parler de lui dans les médias. Entretien sur Radio Classique avec Guillaume Durand , articles dans le quotidien du Groupe Dassault  Le Figaro. 

Mais qui est Denis Kessler ? Brillant étudiant à HEC , puis universitaire ( maîtrise de sciences politiques,  maîtrise d'économie appliquée et  maîtrise de philosophie). Devenu professeur agrégé de sciences sociales en 1977 (1re année du concours), il obtient en 1978 le diplôme d'études approfondies de philosophie et le diplôme d'études approfondies de sciences économiques . 

On oublie aussi de dire qu'il fut un militant maoïste , puis militant à la CFDT , il est ensuite détaché comme assistant de sciences économiques à Paris X auprès de Dominique Strauss-Kahn. 

Denis Kessler est une forme de légende urbaine au MEDEF. Pour certains , il est un épouvantail que cette organisation agite . Dans le blog les Dessous du Social du Figaro, on peut lire sous la plume de Marc Landré ceci : 

Un chiffon rouge que ses détracteurs agitent pour faire peur, un épouvantail que l'on plante pour faire fuir les mauvais esprits. Pour d'autres, c'est un mythe, l'éternel recours, le souvenir du bon vieux où le patronat avait des idées, une doctrine, une existence, du fond et une colonne vertébrale".

Je vous invite à réfléchir sur cet écrit de Denis Kessler publié dans la Magazine Challenges   le  4 octobre 2007 . Tout est dit sur sa conception du social et de l'évolution de notre modèle social.


" Le modèle social français est le pur produit du Conseil national de la Résistance. Un compromis entre gaullistes et communistes. Il est grand temps de le réformer, et le gouvernement s’y emploie.
Les annonces successives des différentes réformes par le gouvernement peuvent donner une impression de patchwork, tant elles paraissent variées, d’importance inégale, et de portées diverses : statut de la fonction publique, régimes spéciaux de retraite, refonte de la Sécurité sociale, paritarisme…
A y regarder de plus près, on constate qu’il y a une profonde unité à ce programme ambitieux. La liste des réformes ? C’est simple, prenez tout ce qui a été mis en place entre 1944 et 1952, sans exception. Elle est là. Il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945, et de défaire méthodiquement le programme du Conseil national de la Résistance !
A l’époque se forge un pacte politique entre les gaullistes et les communistes. Ce programme est un compromis qui a permis aux premiers que la France ne devienne pas une démocratie populaire, et aux seconds d’obtenir des avancées - toujours qualifiées d’historiques - et de cristalliser dans des codes ou des statuts des positions politiques acquises.
Ce compromis, forgé à une période très chaude et particulière de notre histoire contemporaine (où les chars russes étaient à deux étapes du Tour de France, comme aurait dit le Général), se traduit par la création des caisses de Sécurité sociale, le statut de la fonction publique, l’importance du secteur public productif et la consécration des grandes entreprises françaises qui viennent d’être nationalisées, le conventionnement du marché du travail, la représentativité syndicale, les régimes complémentaires de retraite, etc.
Cette architecture singulière a tenu tant bien que mal pendant plus d’un demi-siècle. Elle a même été renforcée en 1981, à contresens de l’histoire, par le programme commun. Pourtant, elle est à l’évidence complètement dépassée, inefficace, datée. Elle ne permet plus à notre pays de s’adapter aux nouvelles exigences économiques, sociales, internationales. Elle se traduit par un décrochage de notre nation par rapport à pratiquement tous ses partenaires.
Le problème de notre pays est qu’il sanctifie ses institutions, qu’il leur donne une vocation éternelle, qu’il les tabouise en quelque sorte. Si bien que lorsqu’elles existent, quiconque essaie de les réformer apparaît comme animé d’une intention diabolique. Et nombreux sont ceux qui s’érigent en gardien des temples sacrés, qui en tirent leur légitimité et leur position économique, sociale et politique. Et ceux qui s’attaquent à ces institutions d’après guerre apparaissent sacrilèges.
Il aura fallu attendre la chute du mur de Berlin, la quasi-disparition du parti communiste, la relégation de la CGT dans quelques places fortes, l’essoufflement asthmatique du Parti socialiste comme conditions nécessaires pour que l’on puisse envisager l’aggiornamento qui s’annonce.
Mais cela ne suffisait pas. Il fallait aussi que le débat interne au sein du monde gaulliste soit tranché, et que ceux qui croyaient pouvoir continuer à rafistoler sans cesse un modèle usé, devenu inadapté, laissent place à une nouvelle génération d’entrepreneurs politiques et sociaux. Désavouer les pères fondateurs n’est pas un problème qu’en psychanalyse.  "

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire